Comme je ne pus faire halte pour la Mort -
C'est ce Monsieur qui fit gentiment halte pour moi-
La calèche ne transportait que nous deux-
Et l' Immortalité.
Nous conduisîmes lentement - il n'était pas pressé
Et j'avais délaissé
Mon ouvrage et mon loisir aussi
Pour son aimable compagnie -
Nous passâmes devant l'école, où des enfants
S' ébattaient en cercles, à la récréation -
Nous passâmes devant les champs de blé nous déviseageant-
Nous passâmes devant le soleil couchant -
Ou plutôt - c'est lui qui passa devant nous-
La rosée devenait tremblotante et glacée
Je n'avais que ma robe de percale -
Et mon étole - de tulle -
Nous fîmes halte devant une maison
Qui semblait une éminence du sol -
Son toit était à peine visible -
Et sa corniche - comme enfoncée -
C'était il y a des siècles- depuis lors,
Tout m'a paru plus court que cette journée
où je me suis douté que la tête des chevaux
Se dirigeait vers l 'éternité. (1)